Les témoignages complets des utilisateurs sourds, malentendants et sourdaveugles sur le relais téléphonique

Depuis le 1er octobre 2018, les utilisateurs sourds, malentendants et sourdaveugles peuvent désormais appeler et être appelés grâce à la mise en place du centre relais téléphonique. La réalité n’étant pas toujours ce qu’elle devrait être et parce que les attentes sont fortes, une mission de préfiguration pour une solution universelle d’accessibilité a été lancée suite à l’annonce faite par le Premier Ministre Jean Castex lors du Comité interministériel du handicap du 5 juillet 2021. 

Unanimes, avec le soutien de ses associations membres, a recueilli le témoignage de personnes utilisant le relais téléphonique.

Si vous souhaitez vous aussi témoigner, contactez Unanimes via info[a]unanimes.fr 

Photo de Cédric Lorant, président d'Unanimes et un extrait de son témoignage : Il est essentiel que les associations de sourds et malentendants participent pleinement à la mise en oeuvre du centre relais téléphonique, une avancée majeure et sociétale.
Cédric Lorant, Président d’Unanimes

Depuis 2009, les personnes sourdes, malentendantes, sourdaveugles et aphasiques se sont largement mobilisées pour la création du Centre Relais Téléphonique. Une avancée majeure et sociétale se dessine suite à la promulgation de la loi Numérique en 2016. En effet, l’accès téléphonique est un facteur incontournable pour une meilleure inclusion dans la vie tant personnelle que professionnelle.

L’accès aux services publics et aux services client des grandes entreprises ainsi qu’auprès de ses interlocuteurs réguliers comme occasionnels ouvre la porte à une plus grande autonomie et indépendance vis-à-vis de son entourage.

Afin que ce dispositif de Centre Relais Téléphonique (CRT) soit le plus efficace possible, il est essentiel que les associations de sourds et malentendants participent pleinement à sa mise en œuvre, notamment à travers les exigences de qualité, de respect des différents modes de communication (LSF, LfPC et transcription écrite, recours à des pictogrammes, interface adaptée) et de rappel de la nécessité d’une solution simple et globale.

Photo de François, 38 ans, Montrouge, Adhérent d'Unanimes et extrait de son témoignage : Le CRT me permet d'être plus autonome avec le téléphone. Après plus de 30 ans à dépendre de mes parents, cela est appréciable. Il était temps !
François, 38 ans, Montrouge

Le CRT me permet d’être plus autonome avec le téléphone notamment pour prendre des RDV ou pour régler des tracas administratifs. Après plus de 30 ans à dépendre de mes parents, cela est appréciable. Il était temps !

Le dispositif du CRT devant se déployer plus largement (avec pour cible 24H/24 et 365J/365) et encore trop peu connu des personnes pouvant en bénéficier, il est important de rester unis pour défendre nos besoins communs d’accessibilité pour une société inclusive.

Photo de Camila, 41 ans, Vanves , adhérente de l'AFIDEO et extrait de son témoignage : Attention aux solutions tout automatiques pour la transcription écrite, l'intervention d'un professionnel diplômé et qualifié est encore aujourd'hui gage de qualité.
Camila, 41 ans, Vanves

En tant qu’utilisatrice régulière du centre relais téléphonique (CRT) depuis sa création en 2018 et sourde oraliste également bilingue, j’avais d’abord pour habitude d’utiliser Roger Voice en optant pour la retranscription écrite mais après plusieurs tentatives, j’ai dû arrêter cette méthode de communication : la retranscription écrite en temps réel est en réalité de la retranscription écrite automatique non qualitative (des approximations qui peuvent entraîner à des malentendus). De plus en utilisant la retranscription automatique, le CRT se met en relation avec l’interlocuteur avec une phrase d’accroche qui est lancée automatiquement avant le démarrage de la conversation en tant que telle (par exemple : « bonjour nous sommes l’équipe Roger Voice et j’assure l’intermédiaire entre une personne sourde et vous »). Cette introduction semble être émise par un robot et j’ai subi de très nombreux raccrochages au nez car une voix robotique fait penser à des démarches commerciales.

Avec ces mésaventures avec la retranscription écrite, je suis passée à la communication par CRT avec des interprètes en LSF. La phrase d’accroche est dictée par eux, une voix humaine et par cette méthode, je ne subis plus de raccrochage au nez et les échanges se font de manière fluide grâce à la qualité des interprètes. Mais il faut connaître la LSF, une chance que n’ont pas de nombreux sourds oralistes. Pourquoi exige-t-on de la qualité pour les interprètes en LSF (exigence de diplôme) et pas pour la retranscription écrite ? La loi Numérique promulguée en 2016 indique clairement que la transcription écrite doit être réalisée par des professionnels de l’accessibilité et que dans un second temps et seulement si la qualité est équivalente, on puisse recourir à de l’intelligence artificielle (IA) pour de la transcription automatique. Aujourd’hui, je constate que le CRT a commencé par l’IA pour la retranscription ! Il faudrait améliorer la qualité de la retranscription pour que chacun ait un vrai choix de communication.

Cela démontre la réticence de nombreux interlocuteurs, sourds comme entendants face aux solutions tout automatiques.

Je voudrais également pointer un autre problème du CRT notamment lorsqu’on choisit la solution avec interprète LSF : le temps d’attente trop long. Je me retrouve fréquemment à avoir une cinquantaine de personnes devant moi ; Attendre pour finalement tomber sur un répondeur, que c’est agaçant ! La qualité des interprètes LSF est là mais pas la quantité. Cela montre au moins le vrai besoin du CRT chez les personnes sourdes. 

Photo de Jean, 64 ans, Neuilly sur Seine, adhérent de l'ANPSA et extrait de son témoignage : Je veux pouvoir appeler un service unique et peu importe qui l’honore. Et que je n’obtienne pas ce service après 3 heures et 3 échecs.
Jean, 64 ans, Neuilly-sur-Seine – ANPSA

Donnez-nous la possibilité d’appeler un numéro unique sans savoir qui sera derrière… Sur le même principe que ce qui se passe avec le réseau téléphonique mobile et les réseaux fibres internet…tel endroit, c’est payé à Orange, tel endroit, c’est Bouygues… Dans telle résidence, c’est Sfr ou Free pour la fibre, etc. Ce n’est pas notre problème. Nous, on veut appeler un numéro unique. Nous voulons un service et peu importe qui l’honore. Et qu’on n’obtienne pas ce service trois heures après, après trois échecs. 

J’exprime un peu ma colère, je l’exprime rarement, mais il faut qu’on avance, qu’on obtienne une solution claire et nette. On a de nombreux exemples sur ce terrain dans le numérique qui fonctionne. Seule la mauvaise volonté de certaines entreprises de services (téléphonie et/ou Crt) empêche la réalisation de ce projet qui peut être vitale pour certains d’entre nous comme appeler les pompiers pour un incendie…

Photo de Claude, 78 ans, Tours-en-Vimeu, adhérent de l'Unapeda et extrait de son témoignage : Attendre 30 minutes qu’on prenne mon appel - quand ça ne coupe pas - alors que j’ai une urgence est insupportable.
Souvent, je dois faire appel à mes enfants pour téléphoner à ma place.
Claude, 78 ans, Tours en Vimeu